En contraignant la femme qui accouche à  rester allongée sur le dos pour faciliter le travail du gynécologue-obstétricien et en appliquant des protocoles médicaux standardisés, tels le monitoring et la perfusion en continu, ou l'administration de produits comme l'ocytocine de synthèse, qui provoquent des contractions souvent moins efficaces que les contractions naturelles, le personnel médical limite la mobilité de la future mère et rend souvent le travail plus lent et plus douloureux.

Actes chirurgicaux souvent traumatisants

D'où un recours très fréquent à  la péridurale et à  des instruments d'extraction tels que la ventouse obstétricale ou les forceps, auxquels s'ajoutent des actes chirurgicaux souvent traumatisants pouvant s'apparenter à  une forme de mutilation, comme la césarienne d'urgence ou l'épisiotomie. Il n'est pas rare par exemple que la cicatrice laissée par cette dernière gêne, voire rende impossible les rapports sexuels, et ce même plusieurs mois après la naissance de l'enfant. Ces pratiques qui, en l'assignant à  la passivité, empêchent souvent la future mère de se sentir actrice de son accouchement, se révèlent tout aussi excluantes pour le futur père, prié au mieux de rester sur le côté et de garder le silence, quand on ne lui demande pas franchement de quitter la pièce. D'où l'impression ressentie par certains parents de ne pas avoir réussi, sous l'éclairage blafard d'une chambre d'hôpital et dans l'agitation régnant alentour, à  s'approprier ce moment si intense, si intime dans la vie d'une famille.

Label " Hôpital ami des bébés "

Des efforts ont pourtant été fournis ces dernières années en matière d'accueil des parents et des bébés au sein des établis- sements hospitaliers belges. À Bruxelles, l'hôpital Érasme a inauguré l'an passé le " Cocon ", le premier gîte intra-hospitalier de Belgique. Dans cet espace géré par une équipe de sages-femmes, il est possible d'accoucher de manière naturelle, sans avoir recours aux méthodes plus classiques décrites ci-dessus. Le Cocon propose aussi à  la mère un suivi prénatal et post-natal spécifique, et accorde " une grande attention " à  la place du père, comme l'indique le site internet de l'hôpital.

Plus d'une vingtaine d'établissements hospitaliers ont par ailleurs obtenu ces dernières années le label " Hôpital ami des bébés ", créé à  l'initiative de l'OMS et de l'Unicef. Si ce label porte avant tout sur la promotion de l'allaitement maternel, il garantit aussi un accueil plus intimiste, bien qu'exclusivement centré sur la relation mère- enfant. Les maternités labellisées s'engagent par exemple à  déposer le bébé directement après l'accouchement sur le ventre de la mère, qui peut le garder pendant une heure contre elle, peau à  peau, et à  laisser le bébé en permanence dans la même chambre que sa mère.

Plusieurs alternatives s'offrent aux parents à  la recherche de lieux ou de personnes leur permettant de s'impliquer tous deux dans la naissance de leur enfant et de faire en sorte que l'accouchement se déroule dans les meilleures conditions possibles sur les plans à  la fois physique et psychologique.

Il est par exemple possible d'accoucher à  l'hôpital en se faisant accompagner par une sage-femme indépendante de son choix qui assistera à  la naissance, qui sera une présence apaisante et qui servira également d'intermédiaire entre le personnel médical et les futurs parents en veillant à  ce que les souhaits de ces derniers soient respectés. Peu de maternités sont toutefois enclines à  accepter cette formule, fait remarquer le site de l'ASBL Alter-NativeS, spécialisée comme son nom l'indique dans les alternatives à  l'accouchement standard en milieu hospitalier.

Dans une maison de naissance, chez soi ou dans l'eau

La maison de naissance peut représenter un excellent compromis pour les parents qui ne peuvent pas ou qui ne se sentent pas prêts à  accueillir leur bébé à  domicile mais ne souhaitent pas avoir recours à  un accouchement médicalisé. Ces lieux à  la décoration intimiste et relaxante évoquant l'intérieur d'une maison sont entièrement gérés par des sages-femmes. Il n'en existe aujourd'hui qu'une poignée en Belgique francophone. En général, il est possible d'accoucher dans un lit ou dans une baignoire, selon les besoins de la future mère qui est laissée libre de ses mouvements et peut donc alterner différentes positions pour faciliter le travail. Au cours des nombreux rendez-vous de suivi de grossesse, plus longs qu'une consultation traditionnelle chez un-e gynécologue, les futurs parents ont la possibilité de nouer une relation de confiance avec la sage-femme et de s'impliquer ensemble dans la préparation de la naissance.

En plus des avantages cités plus haut, l'accouchement à  domicile offre également celui de pouvoir accueillir le bébé dans le confort et la douceur de son chez soi. Il implique aussi souvent une plus grande participation du père, qui peut seconder la sage-femme durant l'accouchement et assurer entièrement les tâches domestiques durant les premiers jours suivant l'arrivée de l'enfant pour soulager la mère.

Il est enfin possible d'accoucher dans l'eau, que ce soit à  domicile, dans les maisons de naissance ou dans les hôpitaux équipés de baignoires adaptées. L'accouchement aquatique est généralement moins douloureux, l'eau chaude ayant un effet relaxant qui facilite et rend le travail plus rapide. Il est également très doux pour le bébé et certaines baignoires permettent également au père de se placer dans l'eau derrière la mère de manière à  la soutenir lors des contractions.

Plus respectueuses de la dimension intime de ce grand moment dans la vie d'un parent qu'est la naissance, ces alternatives permettent en général à  la mère comme au père de mieux s'impliquer dans l'accueil du bébé et de se sentir pleinement acteurs de cet heureux événement.


Illustration : Mathilde Manka


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Dossier paru dans Filiatio #19 - mai/juin 2015